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Né en 1967 à Paris, Filip Leu est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands maîtres tatoueurs contemporains ; et le nom de famille Leu incarne sur la carte mondiale du tatouage l’une des plus importantes lignées européennes du XXe siècle. On fait des milliers de kilomètres pour se faire tatouer par ses soins, et il n’est pas rare de devoir attendre plusieurs années pour un rendez-vous.

 

C’est auprès de son père Felix Leu alias Don Feliz (1945-2002) qu’il pratique, très jeune, l’art du tatouage ; la famille Leu vient alors de s’installer à Goa et Filip réalise les dessins pour les clients de ses parents – sa mère, Loretta, a elle aussi été formée au tatouage par Felix. Encouragé par ce dernier, Filip va ensuite courir le monde, partant au devant des plus grands tatoueurs de l’époque. Pour parfaire son apprentissage, il croise alors Horiyoshi II et III à Tokyo, travaille chez Ed Hardy dans son studio Realistic Tattoo à San Francisco et apprend auprès de Paul Rogers la création de tattoo machines. Rejoignant le studio familial à Lausanne The Leu Family’s Family Iron Studio en 1986, ainsi prêt à formuler son propre style, il invente une rencontre sensible entre l’art traditionnel japonais et une approche contemporaine du tatouage traditionnel ainsi que les iconographies issues de la philosophie du biomécanique. Cette identité esthétique, débutant par une réinterprétation des motifs iconiques du crâne et du dragon, fera désormais sa réputation mondiale.

 

Également impliqué dans la création de nouveaux outils, il met ensuite au point une buse permettant de réaliser de larges aplats d’encre et ainsi d’optimiser le temps de réalisation de très grandes pièces. Sur toile et papier, si le corps humain reste le vecteur privilégié de son art, Filip Leu s’autorise une totale liberté. Ses œuvres ouvrent un couloir modelé par le flux des pensées de l’artiste, et dont les perspectives offrent au spectateur volontaire l’expérience d’un voyage psychédélique.

Dans une veine organique, Filip Leu dessine des machines à tatouer spatiales, un ombilic géant en forme de cyclope ou des galaxies saturées de tatouages old school et japonais. Si son background n’exclut pas, par moment, l’univers de H.R. Giger ou Philippe Druillet, ses compositions et la richesse de sa palette développent une forte direction surréaliste, en droite ligne de celles d’Yves Tanguy ou Roberto Matta. De même, le motif de l’œil inquisiteur que l’on retrouve dans ses toiles n’est pas sans rappeler l’un des leitmotive d’Odilon Redon, fameux peintre symboliste de la fin du XIXe siècle qui voyait dans cet organe la source de toute création. Sur toile ou dans ses tatouages, Filip Leu traduit directement la vitalité qui le traverse, nourri par un vrai parcours en marge et une rare ouverture d’esprit.

Il a réalisé pour le numéro 23 de la revue HEY! modern art & pop culture une série exclusive de 16 peintures, donc 8 sont actuellement présentées dans l’exposition HEY! modern art & pop culture – Act III au musée de la Halle Saint Pierre (Paris) d’octobre 2015 à mars 2016, et dont Anne & Julien sont les commissaires d’exposition. Il a également présenté une pièce magnifique (volume tatoué) dans le cadre de l’exposition désormais historique Tatoueurs, Tatoués au musée du quai Branly (mai 2014 à octobre 2015), et dont Anne & Julien étaient également commissaires.