L’artiste Andreas Nicolas Fischer travaille avec les médias numériques et organise son travail autour de l’exploration plus profonde de la surface pixélisée. Dans sa récente série intitulée « Void », Fischer s’appuie sur son travail antérieur en poursuivant dans le potentiel de l’art comme moyen d’indépendance algorithmique. Il donne ainsi à la technologie l’autonomie ultime dans la création de l’art. L’exploration de l’art numérique de Fischer a commencé sérieusement en 2012 avec son développement du « Schwarm Code », un algorithme unique qui peut générer de l’imagerie originale à l’aide d’un apport visuel fournis par l’artiste. Ce code a été essentiel dans la création de ses deux série « Schwarm » et « Void ». Ce qui frappe cependant, en regardant ces deux travaux, est que, entre les deux, Fischer présente une dualité puissante. La distinction entre les deux noms – « schwarm » (essaim en allemand), qui suggère un rassemblement de masse, et « void » (vide), qui est l’absence totale d’une telle masse, ajoute une dimension dynamique aux compositions qui ne font qu’accroître leur attrait. Les œuvres de la série Void jouent avec des éléments de couleur, de motifs et de surface. Manipulant l’illusion du plan d’image dans ses compositions, Fischer aligne son travail avec les expériences de la période Bauhaus de Lázló Moholy-Nagy dans les années 1940 ainsi qu’avec celles de l’artiste éclectique John Cage dans les années 1960, tous les deux ayant travailler afin d’éliminer la solidité traditionnelle de la toile et de la surface du panneau par le biais de l’acrylique. Dans une mise à jour de cette tradition, Fischer et son algorithme révèlent une dimension profonde qui semble sans fin. Cette qualité éternelle est le point de départ d’une réflexion intrigante de Fischer en ce qui concerne le rôle de l’artiste et son autorité dans la création de nouveaux travaux. La notion d’autorité de l’artiste a été un point central des questionnements des générations de créateurs précédentes. Ce sont les surréalistes du début du 20ème siècle qui ont abordé la question le plus directement, en prenant en compte la présence de la main de l’artiste. En conséquence, ils ont joué avec la manière dont le contrôle conscient de la main pourrait être extrait du processus artistique. Peut-être le plus illustratif de cette approche était le travail de l’américain Man Ray, dont la recherche pionnière des techniques d’aéronautique s’inspire du désir de distancer – physiquement, et pas seulement métaphoriquement – la main de l’artiste de son travail. Fischer explore une distance similaire tout en sondant le potentiel de la technologie pour transcender dans le domaine de l’expression créative. En développant un algorithme se nourrissant avec des images provenant de diverses sources, il est simultanément proche et distant des travaux qu’il crée. Les couleurs riches et les méandres fascinants de la ligne et du volume de ses compositions sont des pièces faites en égale mesure de calcul et de créativité, un mélange qui oblige le spectateur à s’émerveiller à l’éclat de chaque composition tout en saisissant le potentiel possible avec la technologie moderne. Ainsi, alors que le travail de Fischer pouvait être considéré comme une réponse ou une extension de l’ère surréaliste, il semble plutôt offrir un contre-argument à leurs premiers désirs de séparation entre créativité et création. Ce que le travail de Fischer semble illustrer, c’est le pouvoir des relations artistiques symbiotiques, où la créativité émerge par un mélange de sources manuelles et numériques. Dans un certain sens, c’est la relation que nous partageons tous avec la technologie et que Fischer présente grâce à son mode d’expression innovant.